08/12/2009 Vue du jour

celle que tous les jours avec les toutes bagnoles et parfois gyrophares les prix affichés tu pourrais noter chaque jour on verrait ça donne quoi - en grand au dessus quelque chose comme une marque dans d'autres pays c'est beaucoup plus clair exemple - rompetrol - celle où tu t'arrêtes route vers Prague les bagnoles vertes blanches la douane les chiottes néons blancs pas dormi depuis quand - une autre pas loin non plus celle-ci tu t'en souviens parce que le capot ouvert sur une photo noir et blanc le café fumant sur le toit un ou deux écrous rouillés sur le bitume - d'autres et ça te rendrait fou tu passerais une journée entière à te redire toutes les stations de tes routes tu ferais une longue suite de textes et tu dirais chaque station essence et tu écrirais l'histoire fabuleuse des routes immenses -

dans les montagnes à l'Est de Sarajevo sous la pluie tu arrêtes le van blanc la boue tout autour sur la carrosserie un homme sort qui pose le pistolet dans le réservoir et le vent souffle la pluie sur ta gueule usée - tu entends au loin un camion s'éloigner c'est assez lent faut pas s'imaginer non plus et puis alentour les herbes sèches quelques baraques la porte elle déclenche une sonnette une carte de crédit dans le sabot crac crac - deux fois tu démarres et roule - était-ce la même année tu ne sais pas tu ne sais rien tu sais seulement les terres entières que tu as parcourues les plaines jamais sans le gasoil de nos vies - alors fait pas chier à la fin merde et que ça avance la carlingue la route est bleue noire elle fume encore fraîche étalée le pistolet coule sur le bitume - tes pieds dans une flaque mon amour est un diesel sans nom - la poignée de biftons qu'il laisse au patron dans sa cotte rouge essaye un peu voir rouge cotte -

c'est une autre en Espagne un jour de pluie c'est le mois d'aout - tu remontes plein Nord et tu ne sais rien - le bus roule depuis Tanger file vers Amsterdam - tu descends sous la pluie tu paies un sandwich une bière - des gars prient qui s'agenouillent sous l'auvent - les bagnoles filent autour tu mets deux pièces dans un distributeur de cigarettes - tu as froid - tu as froid en Pologne station Oswicem tu paies le plein de gasoil et tu as froid - il pleut toutes les pluies combien de pluies sous des préaux néons blancs - les moteurs chauds l'essence les haut-parleurs des tubes épuisés - souvent le son des bagnoles elles croisent à côté -

ou encore des camions immenses sur un cliché c'est une photo numérique le pays imagine c'est la Jordanie les chiens aboient la caravane passe - et c'est pareil à l'intérieur et c'est pareil tu es assis sur les marches d'un chiotte le soleil derrière - ça s'éclate rouge orange et mange ton soda mon vieux - ce que tu n'as pas avalé depuis le matin les 45 degrés ça va non trois grands coups de klaxon et la semi-remorque s'amoncelle entière en tes mondes - au pied du pistolet à gasoil les gouttes un homme éteint sa clope sur le bitume souillé -

et sales toutes les aires d'autoroutes un jour tu te lèves tu prends ta voiture tu files seul vers le Nord tu roules tu roules tu assèches les nationales - tu t'imagines d'autres routes d'autres voitures d'autres époques et pourtant tu es là bien là à la station essence autoroute plein Nord plus haut Lille - des hommes ont sorti leurs tapis qui prient sur le bitume les papiers tous poussés par le vent gris l'appareil photo sur le tableau de bord tu déclenches - et la mise au point calée sur l'infini -

jusque la capitale - la capitale là-bas la route elle te pousse poussière alentours tu entends ils hurlent les chiens errants - deux néons blancs sous le préau et derrière le grillage ils aboient baves aussi sur le béton des tubes dans les baffles - quelques canettes de bières vides - jusque la capitale les chiens maigres sous leurs poils ras maigres les lampadaires autour -

blanche la lumière au carrefour proche l'Arena deux larges boulevards se croisent pendant qu'une station dort dans le noir - un chien traverse qui court droit - un autre est là qui contre une pile de pneus hurle dingue -

oui - et ça ne s'arrêterait plus nous aussi on hurlerait dingues sans cesse on braillerait - on braillerait - on braillerait tant imagine un peu et ça serait le temps de l'appuiement sur l'accélérateur - et on roulerait - on roulerait sans fin jusqu'à la prochaine station on filerait - on filerait dans la nuit on pousserait jusqu'à ce que les réservoirs s'affonnent hurlent tous comme nous les chiens -

devant la station essence à Tulcéa quand tu arrives depuis Constanta - une BMW bleue immatriculée DIP attend - suivez-là -

celle qu'à la frontière remontant le Monténégro tu t'arrêtes parce qu'il vomit ses tripes entières dans un sac plastique noir et la fatigue d'avoir épuisé nos corps tous raides - les planches en bois blanc sur les vitres les portes toutes condamnées les coups de klaxons autour -

les coups de klaxon dans la nuit au bord d'une route.





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